Catherine Il suffit d'un amour Tome 1 - Бенцони Жюльетта (книги бесплатно без TXT) 📗
Arnaud etreignit Catherine, l'ecrasant contre sa poitrine avec une brutalite sauvage. Possede d'une faim profonde, vieille de plusieurs mois et qu'il n'avait jamais reussi a assouvir, il s'empara des jolies levres, si fraiches et si roses, qui tentaient sa bouche, se mit a les devorer de baisers passionnes. Il la serrait si fort contre lui que Catherine, bouleversee de bonheur, sentait contre son sein droit les battements affoles de son c?ur. Leur deux souffles ne faisaient plus qu'un et la jeune femme crut mourir sous cette bouche exigeante qui aspirait sa vie meme...
Perdus dans leur extase amoureuse, ils vacillaient sur leurs jambes amollies, noues l'un a l'autre comme deux arbustes solitaires au milieu d'une lande battue par la tempete. Ils n'entendirent pas revenir Xaintrailles, rouge, soufflant comme un forgeron et la levre fendue.
Le chevalier, son heaume defonce sous le bras, s'arreta a la porte avec un haut-le-corps. Mais un large sourire silencieux s'etendit sur son visage carre. Sans se presser et sans quitter des yeux le couple enlace, il entra, se versa une rasade de vin qu'il avala d'un trait. Puis, apres avoir enjoint d'un geste autoritaire aux ecuyers d'avoir a rester dehors, il commenca sans se presser, a oter lui-meme les differentes pieces de son armure. Il en etait a la cubitiere droite quand Arnaud, levant legerement la tete, l'apercut... et lacha si brusquement Catherine qu'elle dut se raccrocher a son epaule pour ne pas tomber.
— Tu ne pouvais pas dire que tu etais la ?
— Je m'en serais voulu de vous deranger, riposta Xaintrailles. Ne vous genez surtout pas pour moi ! J'acheve de m'eplucher et je sors...
Tout en parlant, il continuait d'oter les pieces d'acier. Il en etait maintenant aux cuissards, plus avance en cela que son ami qui avait toujours les siens. Catherine, nichee contre la poitrine d'Arnaud, le regardait faire en souriant. Elle n'eprouvait aucune honte, ni meme aucune gene d'avoir ete surprise ainsi dans les bras de l'homme qu'elle aimait. Arnaud etait a elle, elle etait a Arnaud, l'entree meme de Garin n'eut rien change ! Le jeune homme avait passe un bras autour d'elle, comme s'il avait peur qu'elle lui echappat, mais il continuait a surveiller le deshabillage de Xaintrailles.
— Rebecque ? interrogea-t-il. Qu'est-ce que tu en as fait ?
— Il aura du mal a s'asseoir pendant un moment, et il doit avoir une enorme bosse au crane, mais il est entier.
— Tu lui as laisse la vie ?
— Parbleu ! Il ne meritait pas mieux, ce jeune blanc-bec ! Si tu l'avais vu : il tenait sa hache comme un cierge d'eglise. Ma parole, j'en etais tout attendri...
Xaintrailles avait fini d'oter sa carapace. En chemise et chausses collantes, il procedait a une rapide remise a neuf avec un parfum dont il versait de genereuses ondees sur ses cheveux roux. Puis il prit dans un coffre un pourpoint court, en velours vert brode d'argent, chaussa d'interminables poulaines de meme tissu. Ceci fait, il adressa a Catherine un profond et ceremonieux salut !
— Je me jette a vos genoux, trop belle dame ! Et je m'en vais au-dehors pleurer ma mauvaise etoile... et votre manque de gout. En meme temps, je referai connaissance avec le bon vin de Beaune. Ces sacres Bourguignons ont au moins cela de bon : leurs vins !
Il sortit, splendide, majestueux et soupirant a fendre l'ame. Arnaud se mit a rire et Catherine avec lui. L'immense bonheur qu'elle eprouvait a cet instant, lui rendait cher chacun des etres et des choses qui entouraient son bien-aime. Xaintrailles aux cheveux rouges lui plaisait. Pour un peu elle eut eprouve de l'affection pour lui...
Mais Arnaud, maintenant, revenait a elle. Doucement il la fit asseoir sur le lit de camp, prit entre ses deux mains le ravissant visage emu pour mieux le contempler. Il se pencha vers lui.
— Comment as-tu devine que je t'appelais, mur- mura-t-il, que j'avais desesperement besoin de toi ? Tout a l'heure, quand la mort etait si pres de moi, j'ai eu envie de bondir dans cette tribune et de te voler un baiser pour, au moins, quitter ce monde avec le gout de tes levres...
Il l'embrassait a nouveau, a petits coups rapides et doux qui couvraient son visage. Catherine le regardait avec adoration.
— Tu ne m'avais donc pas oubliee ? demanda-t-elle.
Oubliee ? Oh non ! Je te maudissais, je te haissais... ou du moins j'essayais, mais t'oublier ? Quel homme, ayant tenu dans ses bras un instant la beaute meme, parviendrait a l'oublier ? Tu ne sauras jamais combien de fois j'ai reve de toi, combien de fois je t'ai serree contre moi, je t'ai caressee, je t'ai aimee... Seulement, ajouta-t-il avec un soupir, ce n'etait jamais qu'un reve et il fallait toujours en venir au reveil.
— Il n'y aura pas de reveil maintenant, s'ecria Catherine passionnement puisque tu tiens la realite entre tes mains et que tu sais que je t'appartiens deja...
Il ne repondit pas, sourit seulement et la jeune femme ne resista pas a l'envie de poser un baiser sur ce sourire. Personne ne souriait comme lui, avec cette jeunesse, cette chaleur aussi. Ses dents eblouissantes mettaient une lumiere sur la peau brune de son visage.
Arnaud s'etait leve soudain.
— Laisse-moi faire, murmura-t-il.
Avec des gestes adroits, il otait une a une les epingles qui maintenaient le hennin de Catherine, otait le fragile edifice de satin et de dentelles et le deposait aupres de son casque. Puis il libera les cheveux de la jeune femme qui s'etalerent en masse doree, somptueuse sur ses epaules.
— Quelle merveille ! s'extasia-t-il, les mains noyees dans le flot d'or vivant. Une autre femme eut- elle jamais pareille parure...
Il etait revenu pres d'elle et l'enfermait a nouveau dans ses bras, cherchant ses levres, son cou, sa gorge. Le lourd et magnifique collier d'amethystes pourpres le genait. Il l'ota, le jetant a terre comme une chose sans valeur puis s'attaqua a la ceinture orfevree de la robe. Mais brusquement Xaintrailles reparut. Il ne souriait plus.
— Encore toi ? s'ecria Arnaud, furieux d'etre derange. Mais qu'est-ce que tu veux a la fin ?
— Pardonnez-moi, mais je crois que le moment est mal venu pour les jeux de l'amour. Il y a quelque chose qui ne va pas, Arnaud.
— Quoi ?
Les Ecossais ont disparu. Il n'y a plus un seul des notres autour de cette tente... ni sur la lice, d'ailleurs !
Arnaud se releva d'un bond, malgre Catherine qui tentait de le ramener pres d'elle. La sensibilite a vif de la jeune femme lui faisait sentir qu'il se passait quelque chose. Il y avait une menace sur son amour, elle en avait le pressentiment, aigu comme une douleur physique.
— Si c'est une plaisanterie... commenca le jeune homme.
— Est-ce que j'ai l'air de plaisanter ?
C'etait vrai. Xaintrailles etait pale et l'inquietude se lisait sur son visage. Mais Arnaud, tout au desir de se debarrasser de lui au plus vite haussa les epaules.
— Ils sont a boire avec les gens de Bourgogne. Tu n'imagines tout de meme pas qu'ils seraient partis sans nous ?
— Je n'imagine rien, je constate. Nos gens ne sont plus la eux non plus...
A regret, Arnaud se dirigeait deja vers la porte, mais avant qu'il l'eut atteinte, la draperie se souleva sous la main d'un homme a la mine arrogante qui resta debout sur le seuil. Derriere lui, Catherine put voir briller les armes et les cuirasses d'une troupe de soldats.
Le nouveau venu etait jeune, une trentaine d'annees peut-etre et portait de magnifiques armes damasquinees d'or, une cotte de brocart rouge, mais il deplut a Catherine. Elle se souvenait l'avoir deja vu dans l'entourage du duc, sans pourtant y attacher la moindre importance. Elle n'aimait pas sa bouche mince, serree au-dessus d'un menton volontaire et qui, dans le sourire, ne s'entrouvrait jamais. Un sourire comme en ce moment, a la fois triomphant et cruel. Quant aux yeux, a fleur de tete, ils etaient atones a force de froideur. Mais nul n'ignorait, en Bourgogne,