Contes merveilleux, Tome II - Andersen Hans Christian (читать книги онлайн полностью .txt) 📗
«Bien, me donnerais-tu le magnifique sabre d'or? Me donnerais-tu la riche banniere? Me donnerais-tu la couronne de l'empereur?»
La Mort donna chacun des joyaux pour un chant, et Rossignol continua a chanter. Il chanta le tranquille cimetiere ou poussent les roses blanches, ou les lilas embaument et ou les larmes des survivants arrosent l'herbe fraiche. Alors la Mort eut la nostalgie de son jardin, puis elle disparut par la fenetre, comme une brume blanche et froide.
«Merci, merci!» dit l'empereur.»Toi, divin petit oiseau, je te connais bien! Je t'ai banni de mon pays et de mon empire, et voila que tu chasses ces mauvais esprits de mon lit, et que tu sors la Mort de mon coeur! Comment pourrais-je te recompenser?»
«Tu m'as recompense!», repondit Rossignol.»J'ai fait couler des larmes dans tes yeux, lorsque j'ai chante la premiere fois. Cela, je ne l'oublierai jamais; ce sont la les joyaux qui rejouissent le coeur d'un chanteur. Mais dors maintenant, et reprend des forces; je vais continuer a chanter!»
Il chanta, et l'empereur glissa dans un doux sommeil; un sommeil doux et reparateur!
Le soleil brillait deja par la fenetre lorsque l'empereur se reveilla, plus fort et en bonne sante. Aucun de ses serviteurs n'etait encore venu, car ils croyaient tous qu'il etait mort. Mais Rossignol etait toujours la et il chantait.» Tu resteras toujours aupres de moi! dit l'empereur. Tu chanteras seulement lorsqu'il t'en plaira, et je briserai l'automate en mille morceaux.»
«Ne fait pas cela», repondit Rossignol.»Il a apporte beaucoup de bien, aussi longtemps qu'il a pu; conserve-le comme il est. Je ne peux pas nicher ni habiter au chateau, mais laisse moi venir quand j'en aurai l'envie. Le soir, je viendrai m'asseoir a la fenetre et je chanterai devant toi pour tu puisses te rejouir et reflechir en meme temps. Je chanterai a propos de bonheur et de la misere, du bien et du mal, de ce qui, tout autour de toi, te reste cache. Un petit oiseau chanteur vole loin, jusque chez le pauvre pecheur, sur le toit du paysan, chez celui qui se trouve loin de toi et de ta cour. J'aime ton coeur plus que ta couronne, meme si la couronne a comme une odeur de saintete autour d'elle. Je reviendrai et chanterai pour toi! Mais avant, tu dois me promettre!»
«Tout ce que tu voudras!», dit l'empereur. Il se tenait la, dans son costume imperial, qu'il venait d'enfiler, et pressait son sabre d'or massif sur son coeur.»Je te demande seulement une chose: ne dit a personne que tu as un petit oiseau qui te raconte tout; tout ira beaucoup mieux ainsi!»
Puis, Rossignol s'envola.
Lorsque les serviteurs entrerent, croyant constater le deces de leur empereur, ils se figerent, stupefaits, et l'empereur leur dit: «Bonjour!»
Le sapin
La-bas, dans la foret, il y avait un joli sapin. Il etait bien place, il avait du soleil et de l'air; autour de lui poussaient de plus grands camarades, pins et sapins. Mais lui etait si impatient de grandir qu'il ne remarquait ni le soleil ni l'air pur, pas meme les enfants de paysans qui passaient en bavardant lorsqu'ils allaient cueillir des fraises ou des framboises.
«Oh! si j'etais grand comme les autres, soupirait le petit sapin, je pourrais etendre largement ma verdure et, de mon sommet, contempler le vaste monde. Les oiseaux batiraient leur nid dans mes branches et, lorsqu'il y aurait du vent, je pourrais me balancer avec grace comme font ceux qui m'entourent.»
Le soleil ne lui causait aucun plaisir, ni les oiseaux, ni les nuages roses qui, matin et soir, naviguaient dans le ciel au-dessus de sa tete.
L'hiver, lorsque la neige etincelante entourait son pied de sa blancheur, il arrivait souvent qu'un lievre bondissait, sautait par-dessus le petit arbre-oh! que c'etait agacant! Mais, deux hivers ayant passe, quand vint le troisieme, le petit arbre etait assez grand pour que le lievre fut oblige de le contourner. Oh! pousser, pousser, devenir grand et vieux, c'etait la, pensait-il, la seule joie au monde.
En automne, les bucherons venaient et abattaient quelques-uns des plus grands arbres. Cela arrivait chaque annee et le jeune sapin, qui avait atteint une bonne taille, tremblait de crainte, car ces arbres magnifiques tombaient a terre dans un fracas de craquements.
Ou allaient-ils? Quel devait etre leur sort?
Au printemps, lorsque arriverent l'hirondelle et la cigogne, le sapin leur demanda:
– Savez-vous ou on les a conduits? Les avez-vous rencontres?
Les hirondelles n'en savaient rien, mais la cigogne eut l'air de reflechir, hocha la tete et dit:
– Oui, je crois le savoir, j'ai rencontre beaucoup de navires tout neufs en m'envolant vers l'Egypte, sur ces navires il y avait des maitres-mats superbes, j'ose dire que c'etaient eux, ils sentaient le sapin.
– Oh! si j'etais assez grand pour voler au-dessus de la mer! Comment est-ce au juste la mer? A quoi cela ressemble-t-il?
– Euh! c'est difficile a expliquer, repondit la cigogne.
Et elle partit.
– Rejouis-toi de ta jeunesse, dirent les rayons du soleil, rejouis-toi de ta fraicheur, de la jeune vie qui est en toi.
Le vent baisa le jeune arbre, la rosee versa sur lui des larmes, mais il ne les comprit pas.
Quand vint l'epoque de Noel, de tout jeunes arbres furent abattus, n'ayant souvent meme pas la taille, ni l'age de notre sapin, lequel, sans treve ni repos, desirait toujours partir. Ces jeunes arbres etaient toujours les plus beaux, ils conservaient leurs branches, ceux-la, et on les couchait sur les charrettes que les chevaux tiraient hors de la foret.
– Ou vont-ils? demanda le sapin, ils ne sont pas plus grands que moi, il y en avait meme un beaucoup plus petit. Pourquoi leur a-t-on laisse leur verdure?
– Nous le savons, nous le savons, gazouillerent les moineaux. En bas, dans la ville, nous avons regarde a travers les vitres, nous savons ou la voiture les conduit. Oh! ils arrivent au plus grand scintillement, au plus grand honneur que l'on puisse imaginer. A travers les vitres, nous les avons vus, plantes au milieu du salon chauffe et garnis de ravissants objets, pommes dorees, gateaux de miel, jouets et des centaines de lumieres.
– Suis-je destine a atteindre aussi cette fonction? dit le sapin tout enthousiasme. C'est encore bien mieux que de voler au-dessus de la mer. Je me languis ici, que n'est-ce deja Noel! Je suis aussi grand et developpe que ceux qui ont ete emmenes l'annee derniere. Je voudrais etre deja sur la charrette et puis dans le salon chauffe, au milieu de ce faste. Et, ensuite… il arrive surement quelque chose d'encore mieux, de plus beau, sinon pourquoi nous decorer ainsi. Cela doit etre quelque chose de grandiose et de merveilleux! Mais quoi?… Oh! je m'ennuie… je languis…
– Sois heureux d'etre avec nous, dirent l'air et la lumiere du soleil. Rejouis-toi de ta fraiche et libre jeunesse.
Mais le sapin n'arrivait pas a se rejouir. Il grandissait et grandissait. Hiver comme ete, il etait vert, d'un beau vert fonce et les gens qui le voyaient s'ecriaient: Quel bel arbre!
Avant Noel il fut abattu, le tout premier. La hache trancha d'un coup, dans sa moelle; il tomba, poussant un grand soupir, il sentit une douleur profonde. Il defaillait et souffrait.
L'arbre ne revint a lui qu'au moment d'etre depose dans la cour avec les autres. Il entendit alors un homme dire:
– Celui-ci est superbe, nous le choisissons.
Alors vinrent deux domestiques en grande tenue qui apporterent le sapin dans un beau salon. Des portraits ornaient les murs et pres du grand poele de ceramique vernie il y avait des vases chinois avec des lions sur leurs couvercles. Plus loin etaient places des fauteuils a bascule, des canapes de soie, de grandes tables couvertes de livres d'images et de jouets! pour un argent fou-du moins a ce que disaient les enfants.