Contes Merveilleux Tome I - Grimm Jakob et Wilhelm (читать книги без .TXT) 📗
Dessin de Walter Crane
Mais il y tenait absolument et on dut appeler Cendrillon. Alors elle se lava d'abord les mains et le visage, puis elle vint s'incliner devant le fils du roi, qui lui tendit le soulier d'or. Elle s'assit sur un escabeau, retira son pied du lourd sabot de bois et le mit dans la pantoufle qui lui allait comme un gant. Et quand elle se redressa et que le fils du roi vit sa figure, il reconnut la belle jeune fille avec laquelle il avait danse et s'ecria:
– Voila la vraie fiancee!
La belle-mere et les deux s?urs furent prises de peur et devinrent blemes de rage. Quant au prince, il prit Cendrillon sur son cheval et partit avec elle. Lorsqu'ils passerent devant le noisetier, les deux petits pigeons blancs crierent:
«Roucou-cou, Roucou-cou et voyez la,
Dans la pantoufle, du sang plus ne verra
Point trop petit etait le soulier,
Chez lui, il mene la vraie fiancee.»
Et apres ce roucoulement, ils s'envolerent tous deux et descendirent se poser sur les epaules de Cendrillon, l'un a droite, l'autre a gauche et y resterent perches.
Le jour ou l'on devait celebrer son mariage avec le fils du roi, ses deux perfides s?urs s'y rendirent avec l'intention de s’insinuer dans ses bonnes graces et d'avoir part a son bonheur. Tandis que les fiances se rendaient a l’eglise, l’ainee marchait a leur droite et la cadette a leur gauche: alors les pigeons creverent un ?il a chacune celles. Puis, quand ils s'en revinrent de l'eglise, l’ainee marchait a leur gauche et la cadette a leur droite: alors les pigeons creverent l'autre ?il a chacune d'elles. Et c’est ainsi qu’en punition de leur mechancete et de leur perfidie, elles furent aveugles pour le restant de leurs jours.
Dessin de Walter Crane
Chat et souris associes
– Il nous faudra faire nos reserves de nourriture pour l'hiver, dit le chat, sinon nous risquons de mourir de faim. Toi, ma petite souris, tu ne peux pas aller partout, tu pourrais te faire prendre dans un piege. C'etait une bonne idee. Ils acheterent alors un petit pot de saindoux mais ne savaient pas ou le cacher. Ils reflechirent longtemps et, finalement, le chat decida: – Sais-tu ce que nous allons faire? Nous le cacherons dans l'eglise; on ne peut imaginer meilleure cachette! Personne n'oserait emporter quelque chose d'une eglise. Nous poserons le pot sous l'autel et nous ne l'entamerons qu'en cas de necessite absolue. Ils porterent donc le pot en ce lieu sur, mais tres vite le chat eut envie de saindoux. Il dit a la souris: – Je voulais te dire, ma petite souris, ma cousine m'a demande d'etre le parrain de leur petit dernier. Ils ont eu un petit, blanc avec des taches marron et je dois le tenir pendant le bapteme. Laisse-moi y aller, et occupe-toi aujourd'hui de la maison toute seule, veux-tu? – Bien sur, sans probleme, acquiesca la souris, vas-y, si tu veux, et pense a moi quand tu mangeras des bonnes choses. J'aurais bien voulu, moi aussi, gouter de ce bon vin doux qu'on donne aux jeunes mamans. Mais tout cela etait faux; le chat n'avait pas de cousine et personne ne lui avait demande d'etre parrain. Il s'empressa d'aller a l'eglise, rampa jusqu'au petit pot de saindoux et lecha jusqu'a avoir mange toute la graisse du dessus. Ensuite, il partit se promener sur les toits pour voir ce qui se passait dans le monde, et puis surtout pour trouver encore quelque chose de bon a manger. Puis il s'allongea au soleil. Et chaque fois qu'il se souvenait du petit pot de saindoux, il se lechait les babines et se caressait la moustache. Il ne rentra a la maison que dans la soiree. – Te voila enfin de retour! l'accueillit la petite souris. T'es-tu bien amuse? Vous avez du bien rire. – Oui, ce n'etait pas mal, repondit le chat. – Et quel nom avez-vous donne a ce chaton? demanda la souris. – Sanledessu, repondit sechement le chat. – Sanledessu? chicota la souris, quel drole de nom! Assez rare, dirais-je. Est-il courant dans votre famille? – Tu peux dire ce que tu veux, retorqua le chat, mais ce n'est pas pire que Volemiettes, le nom de tes filleuls. Peu de temps apres, le chat se sentit de nouveau l'eau venir a la bouche. – Sois gentille, supplia-t-il, occupe-toi encore une fois de la maison toute seule. Fais cela pour moi, petite souris; on m'a encore demande d'etre le parrain. Le chaton a une collerette blanche au cou, je ne peux pas refuser. La gentille souris fut d'accord. Et le chat se glissa a travers le mur de la ville, s'introduisit dans l'eglise et vida la moitie du pot de saindoux. – Rien a faire, se dit-il, c'est bien meilleur quand on mange tout seul. Et il se felicita de son exploit. Lorsqu'il arriva a la maison, la petite souris demanda: – Comment avez-vous baptise le bebe? – Miparti, repondit le chat. – Miparti? Pas possible! je n'ai jamais entendu un nom pareil. Je parie qu'il n'est meme pas dans le calendrier. Le chat ne tarda pas a se sentir de nouveau l'eau a la bouche en pensant au pot de saindoux. – Jamais deux sans trois, dit-il a la souris. On me demande de nouveau d'etre le parrain. L'enfant est tout noir, seules les pattes sont blanches, elles mis a part, il n'a pas un seul poil blanc. Un enfant comme ca ne nait qu'une fois par siecle! Tu me laisseras y aller, n'est-ce pas? – Sanledessu! Miparti! repondit la souris, ce sont des noms si etranges. Cela ne s'est jamais vu. Ils me trottent dans la tete sans arret. – C'est parce que tu restes tout le temps ici, avec ta vilaine robe gris fonce a longue natte, tu passes toutes tes journees enfermee ici, pas etonnant que tout se brouille dans ta tete, dit le chat. Voila ce qui arrive quand on passe sa vie dans ses pantoufles. Le chat parti, la petite souris fit le menage dans toute la maison. Pendant ce temps-la, le chat gourmand vida entierement le pot de saindoux. – Et voila, pensa-t-il, maintenant que j'ai tout mange, je ne serai plus tente. Si repu qu'il s'essoufflait en marchant, il ne rentra a la maison que la nuit, mais serein. La petite souris lui demanda aussitot le nom du troisieme chaton. – Je suis sur que tu n'aimeras pas, repondit le chat. Il s'appelle Toufini. – Toufini! chicota la souris. Cela parait suspect, ce nom ne me dit rien qui vaille. Je ne l'ai jamais vu imprime quelque part. Toufini! Qu'est ce que cela veut dire, en fait? Elle hocha la tete, se roula en boule et s'endormit. Depuis ce jour, plus personne n'invita le chat a un bapteme. L'hiver arriva, et dehors, il n'y avait rien a manger. La petite souris se rappela qu'ils avaient quelque chose en reserve. – Viens, mon chat, allons chercher notre pot de saindoux que nous avons cache pour les temps durs. On va se regaler. – Tu te regaleras, tu te regaleras, marmonna le chat, cela sera comme si tu sortais ta petite langue fine par la fenetre. Ils s'en allerent et lorsqu'ils arriverent dans l'eglise, le pot etait toujours a sa place mais vide. – «Ca y est, dit la souris, je comprends tout, j'y vois clair a present. Tu parles d'un ami! Tu as tout mange quand tu allais «faire le parrain»: d'abord «Sanledessu», puis «Miparti» et pour finir… – Tais-toi, coupa le chat, encore un mot et je te mange!» Mais la petite souris avait le «Toufini» sur la langue, et a peine l'eut-elle prononce que le chat lui sauta dessus, l'attrapa et la devora. Eh oui, ainsi va le monde.