Том 6. Письма 1860-1873 - Тютчев Федор Иванович (серия книг TXT) 📗
Тютчевой Е. Ф., 11 апреля 1862
Je passe à toi , ma bonne et chère Kitty, et fais à l’occasion des fêtes, comme dans toute autre occasion, les vœux les plus sentis pour ton bonheur. Tous ces vœux pour le moment se résument dans un seul, et il me paraît aussi indigne qu’absurde, que ce vœu-là tarde tant à se réaliser. Je verrais un sac rempli d’or séjourner pendant des jours et des semaines en pleine perspective Nevsky, à la vue du monde entier, que ce fait-là ne me causerait pas plus de surprise.
Hier soir il y a eu un petit bal à la Cour, en l’honneur du G
Fais mes amitiés à la tante et aux deux oncles et charge-toi de dire à Н<иколай> В<асильевич> que je le fais remercier de son envoi littéraire. — Nous avons ici en ce moment le professeur Чичерин , avec qui j’ai dîné hier chez le Prince Горчаков. C’est un homme de bien et de convictions et il serait à désirer que l’exemple qu’il donne devint contagieux. Cela ferait bien vite cesser le charme d’absurdité et d’extravagance, qui comme un cauchemar pèse plus ou moins sur tout le monde. Au revoir, à bientôt, ma fille chérie.
Перехожу к тебе , моя милая, славная Китти, и шлю тебе по случаю праздников, как и по всем другим случаям, самые сердечные пожелания счастья. Все они объединяются сейчас в одно, и мне представляется столь же нелепым, сколь и несправедливым то, что это пожелание все никак не осуществляется. Если б посреди Невского, на глазах у всех неделями лежал мешок с золотом, меня бы это меньше удивило.
Вчера вечером при дворе был дан небольшой бал, кажется, в честь великого князя Владимира. Три твои сестры там были, но Мари мне ничего еще о бале не рассказывала, так как вернулась с него, когда я уже спал.
Кланяйся от меня тетушке и обоим дядюшкам и возьми на себя труд сказать Николаю Васильевичу, что я благодарю его за литературное послание. У нас здесь сейчас профессор Чичерин , вчера я с ним обедал у князя Горчакова. Он человек благородный и с убеждениями, и хорошо было бы, если бы пример, который он подает, оказался заразительным. Это быстро бы прекратило вакханалию глупости и сумасбродства, которая, словно злое наваждение, в той или иной мере захватила всех. До скорого свиданья, милая моя дочь.
Головнину А.В., 16 мая 1862
Середа. 16 мая
Милостивый государь Александр Васильевич,
Позвольте мне обратиться к вашему превосходительству с моею покорнейшею просьбою.
В случае, если мое отправление за границу состоится еще в нынешнем месяце , я крайне был бы обязан вашему превосходительству, если бы вы благоволили разрешить выдачу мне вперед моего месячного жалования за текущий май месяц — не смею прибавить и за будущий.
С истинным почтением честь имею быть вашего превосходительства покорнейший слуга Ф. Тютчев
Тютчевой Д. Ф., июль — август 1862
Martigny. Sion. Bains de Loèche. La Gemmi. Candersteg. Interlaken. Thun.
Cette série de dates résume les derniers quinze jours de mon existence de touriste. C’est tout un monde d’enchantement. Je me suis assuré, par mes yeux, que toutes ces belles choses existent en réalité. Dans quelques semaines j’en douterai.
J’ai eu quelques très bons quarts d’heure dans le courant de ces derniers quinze jours… Des quarts d’heure où je me suis senti vivre de la vie d’autrefois, de la vie d’il y a cent ans…
Savez-vous, ma fille chérie, ce que c’est que la Gemmi, p e
Ce qui est d’une beauté inexprimable, c’est le silence absolu qui règne sur les hautes cimes. C’est un monde à part qui n’appartient plus aux vivants.
A Interlaken j’ai rencontré une foule de Russes, mais personne de très connu, sauf le G<énér>al Poutiatine et l’inévitable Mlle de Gervais que son oncle, le Comte Bloudoff, avait essayé d’enfermer comme folle dans une maison de santé, tentative qui pourtant n’a pas abouti, si ce n’est à une espèce d’apologie assez malencontreuse que le pauvre Comte a été obligé de faire insérer dans les journaux, pour justifier cette mesure non-réussie… Elle allait me raconter toute cette histoire au long, lorsque la cloche d’un bateau à vapeur qui l’emmenait est venue lui couper le sifflet…
Sur le lac de Brienz je suis allé voir le Giessbach, éclairé aux feux de Bengale. Ce jour-là j’ai rencontré, à quelques heures d’intervalle, le fameux Kossuth et la Reine douairière de Naples .
A Thun j’ai donné lieu à une singulière méprise. Quelques stupides Anglais, ayant lu dans le livre des étrangers mon nom accompagné de ma qualité de Chambellan, et n’ayant, à ce qu’il paraît, pu déchiffrer de mon griffonnage que les mots: Empereur de Russie, se sont persuadés que c’est bien l’Emp
A Berne j’ai vu l’ours qui a croqué l’Anglais et qui ne paraît pas s’en souvenir — et à Fribourg l’orgue, que j’avais entendu il y a 22 ans, m’a inondé d’une tristesse qu’aucune parole humaine ne saurait exprimer.
Ah, ma fille, pourquoi vit-on jusqu’à un certain âge…
Eh bien, de tous ces endroits que je vous ai énumérés, je me proposai de vous écrire, mais la conviction m’a manqué. Et, certes, elle aurait manqué à moins. En effet, je ne sais ce qui vous arrive et comment je dois m’expliquer ce silence de néant où vous vous renfermez à mon égard… Heureusement, j’ai usé l’inquiétude, car autrement j’en serais fou à l’heure qu’il est… Les dernières nouvelles que j’aie reçues de vous, c’est ta lettre en date du 2 juillet qui est allée me chercher à Bade. Tu avais, peut-être, quelque raison de me l’adresser là. Car il y a 3 semaines que j’aurais dû y être. Mais au moment d’y aller je me suis si vivement rappelé certaines impressions de la localité, la cohue des salons de jeu, le désœuvrement affairé de tout ce monde plus qu’à moitié canaille se coudoyant toute le journée comme dans une impasse, — voire même le cercle prétentieusement exclusif de nos dames de Pétersb